Accélération de l’Histoire ou étirement du temps // [Acceleration of history or the stretching of time]

Abstract
Dans le monde chrétien ancien, l’Apocalypse et plus généralement les différents schémas eschatologiques firent l’objet de deux modes d’interprétation très différents. Pour les clercs lettrés, c’est la notion d’étirement qui domina : Dieu était seul maître du temps et il pouvait en déterminer la quantité restante selon une chronologie dont lui seul détenait les clés. En revanche, pour ceux qui se bornaient à une saisie littérale de l’Apocalypse, il était possible, voire souhaitable, de prévoir la fin des temps et l’avènement d’une ère nouvelle où l’utopie serait au pouvoir et dont tout mal serait absent. Il y avait alors une volonté d’accélérer l’Histoire pour la corriger. Le présent article s’intéresse à l’immense succès du livre de Norman Cohn, The Pursuit of the Millennium (1957), qui traite précisément de ces mouvements millénaristes. Considéré par le New York Times comme l’un des cent livres les plus importants du xxe siècle, l’ouvrage de Cohn a directement ou indirectement influencé des mouvements tels que le situationnisme, la musique rock ou le New Age. L’histoire de sa réception reste à écrire.